Discours à la Réunion des Etats membres, observateurs et associés de l’Organisation internationale de la Francophonie

le vendredi 17 juin 2016 12:00 Discours

Monsieur le Secrétaire général adjoint des Nations Unies,

Monsieur le Directeur général,

Monsieur le Procureur fédéral adjoint,

Excellences,

Mesdames, messieurs, Chers amis,

Permettez-moi tout d’abord de revenir à l’origine du projet essentiel au sujet duquel nous sommes aujourd’hui réunis.

Le 22 novembre 2011, à La Haye, les Ministères des Affaires étrangères et/ou de la Justice néerlandais, slovène et belge organisaient une conférence internationale d’experts ouvrant la réflexion sur l’existence éventuelle de lacunes juridiques, au plan international, en matière d’entraide judiciaire et d’extradition concernant les crimes internationaux les plus graves, et sur la manière d’y remédier.

Vous étiez, monsieur le président, parmi les intervenants principaux de cette conférence, chargé d’exposer l’état du droit international en la matière quant à la répression des crimes de génocide, crimes contre l’humanité et crime de guerre. Vous aviez conclu (et ce constat est encore d’actualité), qu’il n’existait rien, ou presque rien, en droit conventionnel international pour les crimes de génocide et les crimes contre l’humanité, et à peine plus pour les crimes de guerre.

Ce constat, partagé par des experts venus de 19 pays venus de toutes les régions du monde, allait conduire les trois Etats organisateurs - la Belgique, les Pays-Bas et la Slovénie –, bientôt rejoints dans ce noyau dur par un quatrième - l’Argentine –, à lancer une initiative internationale. Cette initiative a pour but d’ouvrir la négociation d’un nouveau traité en matière d’entraide judiciaire et d’extradition pour cette triade de crimes internationaux que sont les crimes de génocide, les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. Triade de crimes internationaux que vous, Monsieur le Secrétaire général adjoint, cher Monsieur Dieng, vous avez qualifié à juste titre de « crimes d’atrocité de masse » dès 2013, lorsque pour la première fois vous apportiez votre soutien précieux à cette initiative.

Or, il est important de souligner que ce type de criminalité se distingue, outre par sa gravité extrême, par le fait que le lieu du crime, le lieu de résidence du suspect après les faits, celui des victimes et témoins, celui le lieu où peuvent être récoltées les preuves, où l’on peut saisir les avoirs, notamment produits du crime, se situent très rarement en un seul et même endroit, sur le territoire d’un seul et même pays. Au contraire, ces éléments du crime sont très souvent dispersés de par le monde. Sans entraide judiciaire et sans mesure d’extradition, ces crimes peuvent rester impunis.

Ce simple constat est suffisant pour me convaincre non seulement de la justesse, mais surtout de l’urgence de cette cause.

Cette initiative a donc pour but de créer un instrument international qui renforcera de manière déterminante les capacités d’action de chacune de nos autorités nationales d’enquête, de poursuites, d’entraide judiciaire et de jugement, pour que ces crimes ne restent plus impunis, et cela dans le plus strict respect de la souveraineté de chacun. Il ne s’agit pas de se lancer dans des négociations complexes, couvrant des dispositions innovatrices, mais simplement d’appliquer aux crimes d’atrocité de masse les dispositions les plus modernes d’entraide judiciaire et d’extradition déjà acceptées universellement et qui s’appliquent aujourd’hui aux crimes transnationaux, comme par exemple la corruption et le blanchiment d’argent.

En cela, le projet s’inscrit aussi dans le principe de complémentarité sur lequel se fonde le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. Ce principe veut qu’il appartient avant tout aux Etats d’agir dans la lutte contre l’impunité des crimes d’atrocité de masse.

Mais cette initiative n’est pas liée, ni réservée aux seuls Etats parties au Statut de Rome, puisqu’elle a pour objectif de renforcer les capacités d’action et de coopération des autorités nationales.

Je suis d’ailleurs heureux de vous rappeler qu’à ce jour 49 Etats ont marqué leur engagement politique ferme en faveur de notre initiative, parmi lesquels se trouvent des Etats non parties au Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

Ces 49 Etats ont souscrit, soit à la déclaration conjointe déposée en 2013 en marge de l’Assemblée des Etats Parties au Statut de Rome, soit à la déclaration permanente, lancée en 2015 par les quatre Etats initiateurs, ou encore aux deux.

Comme vous le rappeliez dans votre mot d’introduction, monsieur le président, la déclaration de clôture adoptée, en novembre 2014, à l’occasion du XVème Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement des pays ayant le français en partage et ce, à l’unanimité des Etats membres de la Francophonie, appelait à son tour à renforcer les règles d’entraide et d’extradition en ces matières. L’initiative présentée ce jour est très précisément l’outil qui va permettre de concrétiser cet engagement dans notre réalité quotidienne de lutte contre l’impunité.

Par conséquent, je tiens à remercier chaleureusement les Etats ici représentés qui ont déjà rejoint l’initiative, en marquant notamment leur soutien à la déclaration permanente que je viens de mentionner, et j’invite nos invités représentants des Etats qui n’ont pas encore franchi ce pas à nous rejoindre, pour travailler concrètement à rendre ce monde plus juste et plus respectueux de l’humain, dans sa diversité et sa différence.

Monsieur le président,

Monsieur le secrétaire général adjoint,

Monsieur le procureur fédéral adjoint,

Excellences,

En conclusion, j’ai l’honneur d’ouvrir la conférence de ce jour, en vous souhaitant des échanges très fructueux. Je vous remercie pour votre attention.