Koen Geens (re)lance l'informatisation de la Justice avec trois applications

le jeudi 23 juin 2016 05:00 L'Echo

Alors que l'aile francophone du barreau de Bruxelles est en train d'équiper le palais Poelaert de wi-fi, le ministre de tutelle avance sur l'informatisation de la Justice.

Bonne nouvelle! On en a bientôt fini avec les arrêts taillés dans le silex et les jugements envoyés par pigeons voyageurs. Il semble bien que différents acteurs de Justice ont enfin décidé de prendre le problème de l'informatisation à bras-le-corps. C'est le sens du protocole d'accord signé hier matin entre le ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V), le SPF Justice, les différents ordres d'avocats (Avocats.be et Orde van Vlaamse Balie), les notaires et les huissiers. Ces différentes professions, sous la houlette du ministre de la Justice, se sont engagées à soutenir différents projets tels que e-Box, e-Deposit, e-Payment et l'informatisation de la récupération de créances non contestées. "Avec la signature de ce protocole entre le SPF Justice et les professions juridiques, nous jetons la base pour une coopération durable en matière d'ICT. La communication électronique demande toujours au minimum deux partenaires sur la voie rapide électronique", a précisé Koen Geens hier matin en présence de tous les partenaires du protocole. Les textes légaux validant l'usage de ces différentes applications ont été publiés hier au Moniteur belge.

Concrètement, le projet e-Deposit devrait permettre aux avocats de déposer des conclusions par voie électronique. Ce système, qui a été testé avec succès par la cour d'appel d'Anvers, devrait être déployé prochainement dans les tribunaux de commerce. Le projet e-Box, lui, peut être comparé à un réseau de boîtes à lettres électroniques pour la communication de documents en recommandé. Enfin, la possibilité de percevoir des créances non contestées par voie électronique devrait permettre de désengorger les tribunaux.

"L'informatisation de la Justice est un enjeu majeur pour la Justice, les avocats et les justiciables", a déclaré Patrick Henry, le président d'Avocats.be, la plateforme qui regroupe les barreaux francophones et le barreau germanophone de Belgique. Et effectivement, les avocats vont être mis à contribution pour ce programme d'harmonisation de la Justice, comme nous l'a confirmé Stéphane Boonen, le bâtonnier (sortant) du barreau des avocats français de Bruxelles. C'est sous la houlette de ce barreau que le tribunal de commerce francophone de Bruxelles avait été équipé de wi-fi. Ce sera dorénavant également le cas dans le palais de Justice de la place Poelaert où les ouvriers sont en train de tirer les derniers câbles. Au total, la mise sous réseau wi-fi du tribunal et du palais aura coûté 250.000 euros, un budget entièrement pris à charge par l'ordre des avocats français.

Plateforme commune dès octobre

Dans un souci de déployer une formule efficace et complète, Avocats.be et l'Ordre van de Vlaamse Balie ont proposé au ministre de la Justice de lancer une plateforme virtuelle commune accessible à l'ensemble des acteurs de la Justice. Le ministre a accepté, à condition que cette plateforme soit rapidement mise en place. D'après Stéphane Boonen, cela devrait être le cas dès le mois d'octobre. A priori, les projets e-Deposit et e-Box devraient pouvoir venir s'y greffer. La plateforme qui sera proposée par les avocats devrait s'autofinancer par le coût réclamé lors des différentes opérations.

"Malgré des grèves, différents incidents et la menace terroriste, la Justice n'arrête pas de travailler", a souligné un ministre de tutelle visiblement satisfait de l'évolution digitale de la Justice. D'autres développements et applications devraient suivre dans les mois à venir, comme le logiciel Vaja par exemple, qui, à terme, pourrait être une vaste base de données reprenant les arrêts et jugements. Les avocats, de leur côté, travaillent également au développement d'une vaste bibliothèque virtuelle qui devrait leur permettre d'avoir accès à l'ensemble de la jurisprudence et de la doctrine. Mais vu le coût de la littérature juridique (qu'elle soit digitale ou dans sa version papier), des discussions ont encore cours entre les différents barreaux. Précisant qu'ils entendaient continuer à miser sur une Justice numérique, les huissiers ont également voulu souligner que "les ordinateurs ne pourront jamais remplacer la connaissance du terrain, la capacité intuitive et la connaissance humaine d'un huissier de Justice".

Les notaires, qui enregistrent déjà plus de 900.000 actes en ligne par an, ont salué la mise en place du projet e-Box qui leur "permettra de communiquer en ligne et légalement avec les greffes et les autres professions juridiques".

NICOLAS KESZEI