Question orale de Koen Geens au premier ministre De Croo sur ‘l'examen de la loi pandémie au Parlement’ en séance plénière

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Koen Geens (CD&V): Je suis très satisfait du courrier en- voyé par le premier ministre au sujet de la loi pandémie que la ministre de l'Intérieur avait annon- cée début janvier. Dans ce cour- rier, il assume la paternité de cette loi.

Notre pays ne connaît pas de sus- pension de nos libertés fondamen- tales. La Constitution interdit même l'état d'urgence par le biais d'une loi générale dans notre pays. Lorsque, au moment de la for- mation du gouvernement Wilmès, on a cherché une solution à la- quelle se rattacher afin de gérer la situation difficile que nous vivions, nous avons utilisé la loi de 2007 relative à la sécurité civile sur laquelle se basent la plupart des juristes sensés pour ce qui re- garde l'arrêté ministériel. Nul ne pouvait toutefois prévoir que la crise durerait aussi longtemps. La loi de 2007 vise les crises de cour- te durée.

Comment la loi pandémie s'inscri- ra-t-elle dans le cadre des concertations interfédérales? La loi du ministre de la Santé pu- blique sera-t-elle également sou- mise au Parlement? Le fait que le premier ministre déclare qu'il n'invoquera pas l'urgence me pré- occupe.

Alexander De Croo, premier ministre: Les arrêtés ministériels ont une double base légale: la loi sur la fonction de police du 5août 1992 et la loi relative à la sécurité civile du 15 mai 2007. Ces lois ont été adoptées par le Parlement et acceptées plusieurs fois comme fondements valables par le Con- seil d'État ou elles ont été confirmées en appel.

De plus, chaque fois que le gouvernement a pris un arrêté ministériel, il l'a fait dans le respect des normes supérieures, en veillant à l'efficacité et à la proportionnalité des mesures au regard des objectifs à atteindre. Nous avons toujours fait preuve de clarté: nous prenons des mesures à travers cette double disposition et un arrêté ministériel, mais en nous limitant à ce qui est nécessaire. Au demeurant, chaque fois que nous prenons un arrêté ministériel, il est assorti d'une motivation détaillée et d'un avis scientifique.

C'est important de le rappeler. En écoutant certains d'entre vous, on pourrait croire qu'au cours des mois précédents, le gouvernement s'est basé sur un flou artistique d'un point de vue juridique, qui aurait été contesté partout. Or ce n'est pas le cas. Chaque fois, le Conseil d'État a confirmé la méthode employée, dont la stabilité a aussi été reconnue par les cours et tribunaux.

Il existe aussi à côté de la réalité juridique une réalité politique. Un débat parlementaire et sociétal fait rage au sujet des mesures radicales et prolongées. Cette cri- se exceptionnelle exige ces me- sures. Le gouvernement n'est pas sourd à la demande d'un débat plus large. C'est la raison pour laquelle j'ai envoyé une lettre mardi dernier à la présidente de la Chambre dans laquelle le gouver- nement tend la main au Parle- ment. Le gouvernement déposera le projet de loi pandémie au Parlement à un stade précoce de la procédure afin que l'apport d'un large débat parlementaire puisse être intégré dans le projet avant de l'envoyer au Conseil d'État.

Madame Fonck, durant ce débat, sera-t-il possible d'inviter la société civile, par exemple? Cela relève de l'organisation du Parlement, qui doit décider si c'est opportun et s'il veut le prévoir.

Nous voulons donc organiser un débat fondamental auquel coopè- rent la majorité et l'opposition dans un esprit constructif. Cette métho- de impliquant le Parlement à un stade aussi précoce est inédite mais justifiée parce qu'il s'agit de trouver un équilibre entre la santé et la sécurité, entre la respon- sabilité collective et la responsa- bilité individuelle. Ce sont des questions fondamentales.

J'ai indiqué un deuxième élément dans ma lettre: comme c'est le cas maintenant, tous les ministres du gouvernement sont disposés à débattre avec les parlementaires de l'arrêté ministériel et de son contenu. Là aussi, c'est au Parlement de s'organiser. Nos ministres passent beaucoup de temps à débattre des éléments des arrêtés ministériels. Là aussi, le gouvernement tend la main au Parlement pour organiser cela et peut-être le faire de manière plus systématique qu'aujourd'hui.

On peut dire que ce que l'on fait ici revêt un caractère assez

exceptionnel. J'espère que nous serons tous à la hauteur d'un débat au cours duquel nous pourrons unir toutes nos forces mais aussi nos convictions. Par rapport aux libertés de base, il ne s'agit sans doute pas du clivage classique entre majorité et opposition; c'est beaucoup plus large que cela et on doit pouvoir débattre en le dépassant.

Je réponds à quelques questions ponctuelles. En ce qui concerne le timing, on devrait pouvoir venir devant le Parlement vers la fin du mois de février, début du mois de mars. Le but est-il d'avancer afin que cette loi puisse encore être utilisée pendant cette pandémie? Si nous devions apprendre la nouvelle exceptionnelle que la pandémie se termine dans un mois (...)

Koen Geens (CD&V): Un proverbe français dit qu'il n'y a que le provisoire qui dure et je crains que ce proverbe se vérifie. Je suis favorable au renouveau politique mais la loi pandémie doit aussi voir le jour rapidement si l'on ne veut pas qu'elle rate l'effet psychologique espéré.

La perspective d'un bon débat parlementaire me réjouit mais il peut certes être quelque peu abré- gé, pour ma part, si l'occasion nous est donnée par la suite de débattre dans le détail des mesures prises sur la base de la loi pandémie.

L'incident est clos.