Koen Geens: "Même si Napoléon avait 150 ans d'avance, il est temps d'évoluer"

op 02 september 2015 10:30 La Prem1ère


Il n'y a pas que la rentrée scolaire qui a lieu chaque année en septembre, il y a aussi la rentrée judiciaire. Et cette année les critiques fusent de toutes parts dans le monde de la justice. Principal grief, les économies prévues par le gouvernement.

Démocratie en danger ?

Pour le ministre de la Justice Koen Geens (CD&V), invité au micro de Matin première ce mercredi, il est temps de changer les choses. Pour autant, les sacrifices budgétaires consentis ne sont pas de nature à mettre en danger l'indépendance du pouvoir judiciaire comme l'a laissé entendre le procureur général auprès de la Cour de cassation, Patrick Duinslaeger, lors de sa mercuriale prononcée mardi matin. "Je crois que j’ai depuis le début de mon mandat reconnu l’urgence. Et j’ai toujours dit que les économies que la justice doit faire seront lourdes à porter. Il faut donc rendre la justice efficace et moins économiser au début".

Et le ministre de la Justice de s'empresser d'insister sur la concertation réalisée avec ce monde judiciaire qui l'a tant critiqué ces derniers mois. "Je parle jour et nuit avec ces personnes de la justice. On s’entend, on s’écoute. Et le 1er septembre est un moment pour lancer des cris d’alarme. Je crois simplement que le ton n’est pas celui auquel on pourrait s’attendre. On fait un tel investissement au cabinet qu’un peu de patience serait le bienvenue. Le procureur auprès de la cour de cassation, Patrick Duinslaeger, a d’ailleurs reconnu que j’avais bien négocié les économies lors du dernier contrôle budgétaire. En même temps, les cadres des tribunaux ici à Bruxelles, par rapport aux cadres de ceux d’autres villes du pays, sont bien remplis. Ce ne sont pas toujours les mieux nantis qui sont les plus contents".

Sur les propos de Luc Hénart à son sujet, le président du tribunal de première instance de Bruxelles qualifiait le ministre "d’agent soporifique du gouvernement", Koen Geens botte en touche. "D’abord, j’ai de l’estime pour Monsieur Hénart. Je ne me reconnais pas dans ces propos désagréables. En même temps, Monsieur Henart dit qu’il fait partie de la résistance. J’ai des difficultés à comprendre. Je fais tout pour avancer, les magistrats le savent. Les projets de loi actuellement au parlement sont d’ailleurs le fruit de longues discussions avec les magistrats et reprennent presque toutes les suggestions qu’ils m’ont donné pour rendre plus efficace la Justice ".

La réforme du rôle du juge d’instruction

Exemple symptomatique de la levée de boucliers à laquelle fait face le projet de réforme de Koen Geens, la modification du rôle du juge d'instruction. Une réforme liberticide selon les juges d'instructions, nécessaire si l'on veut évoluer selon le ministre. "Dans un premier temps on verra ce que l’on fait de cette réforme. En même temps, c’est le projet de loi qui revient du Conseil d’Etat et l'on prépare également une réforme de la procédure pénale. J’ai encore parlé avec mes experts hier. Et on viendra avec des propositions. De tous les pays, nous sommes les plus proches du code Napoléon originel. Et même si Napoléon avait 150 ans d’avance, il est temps d’évoluer. Et moi je vais tenter de changer la base, le software de notre justice, c’est nécessaire pour avoir une justice moderne".

CD&V et gouvernement

Concernant la place du CD&V dans le gouvernement, le ministre de la Justice se montre satisfait. "Je suis satisfait mais pas toujours de la perception. La perception que l’on a donnée du tax-shift, qui est une idée de mon parti, une idée pour laquelle nous avons lutté, nous a déçu. Raison pour laquelle Kris peeters s’est quelque peu révolté". Le CD&V participe-t-il pour autant à une politique qui favorise les flamands qui possèdent au détriment de ceux qui travaillent, comme Luc Cortebeeck, ancien patron de la CSC le clame ? "Nous sommes un parti du centre. Et quand nous nous trouvons dans un gouvernement plutôt de gauche, nous sommes critiqués par l’aile droite de notre parti. Et vice-versa. Cela veut surtout dire que nous jouons bien notre rôle. Nous ne sommes pas là pour servir les syndicats seuls. Nous ne sommes pas là pour servir les employeurs seuls. Nous sommes là pour trouver le compromis qui surmonte leurs oppositions".

Crise des migrants

Quant à la question du statut des migrants, Koen Geens est très clair: "Au niveau des principes, quelqu’un qui a reçu l’asile est un égal. Il doit être traité de façon identique que le Belges. Je ne suis pas pour deux statuts. Je plaide surtout pour beaucoup plus d’Europe. Même si nous jouons devant des tribunes locales. Car c’est Londres qui demande des solutions et qui prône 'plus d’Europe'. Londres qui ne fait pas partie de Schengen. Car l’Europe n’a pas réussi à faire ce qu’il fallait faire en raison du fait que la plupart des Etats se sont comportés comme des vieux européens qui veulent protéger leurs richesses. Et ce comportement n’est plus acceptable de nos jours. La générosité des allemands dans cette histoire de migrants, et même dans la crise grecque, ne doit pas être sous-estimée. Car finalement, ceux qui permettent l’intégration de 800 000 migrants, ce sont les allemands".

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