La révision d'un jugement pénal sera bientôt plus facile

op 13 juni 2017 09:27 L'Echo

La Belgique disposera bientôt d'un système plus souple qui permettra de rouvrir des dossiers pénaux clôturés. Le ministre Koen Geens estime que la Justice doit également oser rectifier des erreurs judiciaires.

En Belgique, les personnes jugées définitivement, quel que soit le délit - vol ou assassinat - ne peuvent pas y changer grand-chose. Demander la révision d'un dossier est légalement possible, mais les conditions liées à cette réouverture sont tellement nombreuses - et la procédure est tellement lourde - que seules quelques demandes ont été introduites. Depuis 2008, la cour de cassation n'a enregistré que 29 dossiers et seuls trois cas ont effectivement mené à une révision du jugement.

Mais le ministre de la Justice Koen Geens (CD & V) compte assouplir la loi pour faciliter la réouverture des dossiers clôturés. Actuellement, cette procédure nécessite que trois avocats - qui doivent être inscrits à la cour de cassation ou qui plaident depuis dix ans au moins en cour d'appel - rendent un avis positif. Cette démarche ne sera bientôt plus nécessaire. Seules les pièces nécessaires devront être introduites en Cassation, qui procédera elle-même à un premier examen.

Geens élargit également la définition de "fait nouveau" autorisant la demande de révision. De nouveaux motifs pourront être invoqués pour justifier une demande de réouverture. Il suffira qu'une "donnée" qui aurait pu mener à un acquittement et qui n'était pas connue au moment du procès surgisse. De même, l'abandon des poursuites ou l'assouplissement de la loi pénale qui aurait mené à une condamnation plus légère pourront justifier une demande de révision. Exemple concret: une personne condamnée pour assassinat au moment où les analyses ADN n'étaient pas possibles, et que les recherches actuelles permettent d'innocenter grâce à la découverte d'autres éléments.

Redressement en droit

"La révision d'un procès restera une procédure exceptionnelle. L'objectif n'est pas de créer une troisième instance dans la procédure, explique le ministre Geens. Mais le but est bien que, lorsqu'on peut démontrer de manière irréfutable qu'une erreur s'est produite dans la prise de décision du juge, un 'redressement en droit' soit désormais possible."

L'assouplissement de la loi se traduira vraisemblablement par une hausse des demandes de révision, sans pour autant créer une avalanche de procès en révision. C'est la conclusion que nous pouvons tirer de l'expérience des Pays-Bas, où la loi a été assouplie en octobre 2012, et sur laquelle Geens se base aujourd'hui pour modifier la loi belge. Dans les années 2013 et 2014, 21 demandes de révision ont été introduites aux Pays-Bas. Nous en comptons quasiment le même nombre en Belgique en neuf ans. Mais sur ces 21 dossiers, seuls cinq cas ont obtenu le droit d'être réexaminés. On ne parle donc pas d'avalanche chez nos voisins du nord.

Une intervention ministérielle ne sera plus possible

Autre changement important: désormais, le ministre de la Justice ne pourra plus intervenir pour demander la révision d'un jugement.

Aujourd'hui, c'est possible. Un exemple connu est celui du triathlète Filip Meert qui a trouvé une oreille favorable auprès de l'ancien ministre de la Justice Stefaan De Clerck (CD & V) pour faire revoir sa condamnation de 2001, à savoir cinq ans d'emprisonnement pour sa participation à un carrousel TVA. Mais la cour d'appel d'Anvers a estimé en 2012 qu'il n'y avait aucune raison d'organiser un nouveau procès. Koen Geens estime qu'il vaut mieux que le ministre ne se mêle pas de ces dossiers pour respecter la séparation des pouvoirs et l'indépendance des juges.

Autre élément important pour Koen Geens: pour garantir un traitement objectif, c'est un autre tribunal ou cour d'appel qui sera chargé du nouveau procès.

Le ministre Geens a déjà discuté une première fois de son projet de changement de loi au niveau gouvernemental, et souhaite le faire approuver cette année encore par le conseil des ministres. Le Conseil supérieur de la Justice, qui contrôle le fonctionnement de la Justice, a déjà rendu un avis positif sur le projet.

LARS BOVÉ