Conditionnelle Ducarme pour l’incompressibilité

op 30 maart 2016 07:40 Le Soir
En remettant en question la législation actuelle, en fixant d’emblée la barre minimale à quatre 4/5 e de la peine prononcée, le ministre de l’Intérieur se met en porte-à-faux par rapport à son collègue ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V). Dans son plan justice, il pensait fixer un terme unique pour tous : la moitié de la peine.

C’est ce que rappelle le député CD&V Raf Terwingen. « Koen Geens avait déjà proposé de durcir les conditions de la libération conditionnelle. La N-VA suggère aujourd’hui une obligation de purger les 4/5 e ? On peut en discuter, mais le plus important c’est d’examiner les arguments sociétaux sur toutes les facettes. On peut effectivement avoir une discussion sur le délai : la moitié de la peine, les 2/3, les 4/5 e … je ne veux pas prendre position, mais on peut aussi avoir une discussion sur les conditions de la libération et la manière de les contrôler plus sévèrement. »

Dans la majorité gouvernementale, juste à droite du CD&V, on ne se mouille guère. « Un durcissement est en effet nécessaire, dit Carina Van Cauter (Open-VLD). La période de protection prononcée par le juge du fond se trouve dans l’accord gouvernemental. La peine exécutée doit mieux refléter la peine prononcée. »

PS et CDH aussi pour une réforme

Dans l’opposition, le PS joue aussi la carte de la prudence. « Il est prématuré de tirer des conclusions, surtout avant les éléments de réponse que nous livrera la commission d’enquête parlementaire », fait-il savoir, via sa porte-parole, Laurette Onkelinx. Par contre, pour la chef de groupe PS, il y a un changement à faire dans l’organisation du tribunal d’application des peines (TAP) : « Il faut y inscrire l’obligation, pour le parquet, de lancer immédiatement un mandat d’arrêt international à l’encontre des profils dangereux pour lesquels le TAP a révoqué la libération conditionnelle. » Actuellement, cette disposition est réglée par une circulaire des procureurs généraux, « il faut d’urgence inscrire cette disposition véritablement dans la loi procédure TAP ».

Le CDH, par la voix du député Georges Dallemagne, est favorable à un durcissement au cas par cas. « Des mesures linéaires (par exemple, pas de libération avant les 2/3 de la peine) pourraient être insuffisantes dans certains cas et excessives dans d'autres. C'est le tribunal qui pourrait indiquer la période minimale d'incarcération. »

La vraie surprise dans ce dossier vient du chef du groupe réformateur Denis Ducarme. Avec une réponse en deux temps. Au nom de son parti d’abord. « Quand on voit qu’un des terroristes n’a pas respecté l’ensemble des conditions de sa libération, il y a bel et bien un champ à explorer. Au MR, nous plaidons depuis longtemps pour rendre certaines peines incompressibles mais, avant de déposer un texte en ce sens,(...) le MR veut vérifier ce qui, exactement, n’a pas été respecté. Nous ne voulons pas de dépôt de texte tant que la commission d’enquête n’a pas fait son travail et n’en a pas tiré ses conclusions. Il y a un ordre des choses à respecter. »

Mais Denis Ducarme s’exprime aussi en son nom propre, durcissant considérablement le ton : « J’estime qu’il faut franchir le pas, il faut prévoir des peines incompressibles pour des infractions liées au terrorisme. À terme, dans ces cas précis, il n’y a effectivement pas d’autre piste possible. »

ÉRIC BURGRAFF